Grand Prix d’excellence en architecture de l’Ordre des architectes du Québec

Le prestigieux Grand Prix d’excellence en architecture 2023 de l’Ordre des architectes du Québec a été décerné au projet de métamorphose de l’Insectarium de Montréal, une réalisation de Kuehn Malvezzi, Pelletier de Fontenay et Jodoin Lamarre Pratte architectes en consortium. Le parcours immersif, la synergie entre l’architecture et le paysage et les défis techniques relevés pour matérialiser le concept muséal ont retenu l’attention du jury :

« Ce projet d’exception a unanimement retenu l’attention du jury dès la phase de préanalyse des candidatures et pendant toute la durée des délibérations. Dans cet établissement de l’Espace pour la vie, à Montréal, la notion de biophilie prend tout son sens. Le volume de verre à la silhouette bien contemporaine et le socle de terre et de végétaux luxuriants qu’il coiffe offrent ensemble un parcours immersif qui invite non seulement à découvrir les insectes, mais aussi à emprunter leur point de vue sur leur environnement. Les défis techniques qu’il a fallu relever pour transformer à ce point l’expérience muséale de même que la forte synergie entre l’architecture du bâtiment et du paysage qui favorise son intégration au Jardin botanique de Montréal valent à ce projet l’un des deux Grands Prix que le jury a choisi de décerner cette année. »

La métamorphose de l’Insectarium de Montréal redéfinit notre relation avec les insectes

Regroupant le Biodôme, la Biosphère, l’Insectarium, le Jardin botanique et le Planétarium, Espace pour la vie est le plus grand complexe muséal en science de la nature du Canada. Il incarne un mouvement urbain audacieux et créatif qui invite chacun d’entre nous à repenser le lien qui unit l’humain et la nature et à cultiver un nouveau mode de vie. C’est dans cette volonté que le nouvel Insectarium, niché aux côtés du Biodôme et du Jardin botanique, vise à transformer la relation du public avec les insectes par une approche architecturale et muséologique innovante.

Le projet de l’Insectarium a été réalisé par les architectes berlinois Kuehn Malvezzi, les firmes montréalaises Pelletier de Fontenay et Jodoin Lamarre Pratte architectes, ainsi que les architectes de paysage atelier le balto, basés à Berlin. En collaboration avec les ingénieurs Dupras Ledoux et NCK, cette équipe avait remporté en 2014 le concours d’architecture international avec un concept visant à fusionner l’architecture et la nature.

Après une période de conception et de construction de sept ans, l’Insectarium a ouvert ses portes le 13 avril 2022 en révélant au public des centaines d’espèces d’insectes. La nouvelle construction, qui remplace l’ancien bâtiment datant de 1990, présente d’importantes expositions d’insectes naturalisés et des habitats permettant aux espèces vivantes de s’épanouir. Un labyrinthe sensoriel immersif est au cœur du projet, ainsi qu’un jardin, une grande serre, un atelier de création et des zones de production.

Inauguré à un moment clé pour repenser les liens entre la biologie humaine et non humaine, le nouvel Insectarium de Montréal apporte une approche critique et nouvelle pour les musées d’histoire naturelle.

Architecture et nature

La conception s’appuie sur une analyse détaillée de 400 ans de musées, d’orangeries, de serres et autres architectures destinées à étudier et à montrer le monde naturel. Conscient de l’histoire destructrice de cette division théorique entre les humains et les autres formes de vie naturelle, l’approche conceptuelle renverse les normes et les attentes muséologiques.

Contrairement aux musées conçus pour abriter des expositions fluctuantes, l’approche curatoriale de l’Insectarium et son expression muséologique sont contenues dans l’architecture même du bâtiment. Le parcours précisément chorégraphié à travers le bâtiment abolit le clivage entre l’humain et la nature grâce à des expositions accessibles à tous et à des expériences sensorielles immersives.

L’architecture extérieure de l’Insectarium est caractérisée par trois volumes archétypaux qui s’intègrent au paysage du Jardin botanique. Le Jardin des pollinisateurs fait office d’espace d’accueil relaxant en plein air. Il descend jusqu’à la base de la serre, qui accueille le hall d’entrée et des milieux de vie pour insectes vivants. Au-delà de la serre, un monticule végétalisé et énigmatique émerge en surface. Ce dôme en forme de cocon abrite la collection de l’Insectarium.

Expérience immersive

L’expérience du visiteur de l’Insectarium commence et se termine par une promenade dans le Jardin des pollinisateurs. Il estompe la limite entre l’intérieur et l’extérieur, tout en offrant une première rencontre avec la vie entomique.

Une fois le hall d’entrée franchi, commence l’expérience immersive de la métamorphose sensorielle. Le Labyrinthe emmène les visiteurs sur un chemin descendant incurvé et aux parois inclinées. Le parcours est conçu pour désorienter, pour signaler l’abandon des environnements spatiaux connus et l’entrée dans un passage souterrain de six Alcôves perceptuelles.

Les six espaces désorientent les sens humains et simulent la vue, l’ouïe et le ressenti des insectes :

  • Un œil, plusieurs facettes reproduit la vision pixellisée d’une mouche;
  • Vibrant message amplifie les vibrations de la pièce pour illustrer la capacité sonique d’une sauterelle;
  • De brin en brin est un parcours d’équilibre entre des tiges, à la façon d’une coccinelle au sommet d’un brin d’herbe;
  • Passage étroit transforme les humains en cafards, qui doivent se serrer les uns contre les autres;
  • Le monde en UV reproduit la vision ultraviolette d’une abeille;
  • Balade au plafond met le monde sens dessus dessous.

Après avoir expérimenté différentes sensations dans les six salles, les visiteurs rencontrent finalement des insectes vivants dans la Galerie tête-à-tête. Six boîtes d’observation conçues sur mesure permettent aux visiteurs de faire abstraction du monde extérieur en pouvant observer de près des insectes dans différents vivariums. Les niches facilitent un contact intime avec les différentes espèces, qui a été précédemment redéfini par les espaces perceptifs et immersifs.

Collection chromatique

La collection de spécimens naturalisés de l’Insectarium est abritée et exposée dans une salle spectaculaire de dix mètres de haut en forme de dôme, qui émerge de la terre près du bâtiment­. Sur la paroi intérieure en béton projeté, 72 cadres de présentation exposent la vaste et unique collection d’insectes préservés du musée, qui se déploie sur deux bandes horizontales. La première bande est organisée de manière chromatique pour montrer l’extraordinaire biodiversité et la beauté des insectes. La deuxième suit une logique encyclopédique pour révéler le succès évolutif des insectes à travers différents thèmes, tels que l’habitat et le genre. Ces deux niveaux ont pour effet combiné d’étonner et d’instruire le public.

Rencontres interespèces

Réémergeant des textures terrestres souterraines, les visiteurs entrent dans le Grand vivarium. Cette serre spacieuse et baignée de lumière présente un parcours à travers une série de microclimats favorisant la vie de diverses espèces de plantes et d’insectes. Un grand nombre de ces insectes, tels que les papillons et les chenilles, se déplacent librement dans l’espace. D’autres, comme les fourmis coupeuses de feuilles, les scarabées géants, les scorpions et les mille-pattes géants, sont présentés dans des vivariums en verre intégrés au paysage botanique du Grand vivarium.

Au centre du bâtiment, l’Atelier créatif accueille des présentations, des discussions, des conférences et des activités pédagogiques pour les adultes et les enfants. L’espace vitré offre des vues sur le Grand vivarium et la zone de production et, au-delà de l’Insectarium, sur le Jardin botanique.

Construction bioclimatique

Afin que le bâtiment soit en véritable symbiose entre ses habitants et ses visiteurs, l’Insectarium intègre plusieurs principes bioclimatiques et de durabilité. La forme en gradins du volume de la serre est naturellement orientée vers le sud et les zones situées en surface bénéficient d’un ensoleillement maximal tout au long de l’année. Des dispositifs mécaniques perfectionnés permettent de récupérer une grande partie de la chaleur générée dans les serres et de la redistribuer pour chauffer le reste du bâtiment.

Les parties souterraines profitent de la masse thermique de la terre pour stabiliser les variations de température et maximiser l’isolation du bâtiment. Une série de systèmes complémentaires tels que des stores textiles, des persiennes motorisées, des puits géothermiques, la récupération des eaux pluviales et l’utilisation de matériaux locaux, durables et sans COV renforcent l’approche bioclimatique du bâtiment et font de l’Insectarium un bâtiment véritablement durable. La certification LEED Or est visée.

 

Fiche technique

Client : Espace pour la vie, Montréal

Directeurs de l’Insectarium : Maxim Larrivée (à partir de 2019) et Anne Charpentier (jusqu’en 2019)

Adresse du projet : 4581, rue Sherbrooke Est, Montréal, Québec, Canada  H1X 2B2

Période de conception et de construction : 2014 – 2022

Coûts de construction : 33,26 M$ CAD (incluant muséologie et taxes)

Superficie : 3 600 m²

Longueur du parcours muséal : Approximativement 350 m

Spécimens d’insectes naturalisés : environ 3000 espèces

Spécimens d’insectes vivants : environ 150 espèces

Spécimens de plantes dans le Grand vivarium : environ 150 espèces et 3000 spécimens

Certification : LEED Or (visée)

Prix (à ce jour) : Grand prix d’excellence en architecture de l’Ordre des architectes du Québec (2023), DAM Preis —nomination « shortlist » dans la catégorie Bâtiments à l’étranger pour le (2023, Allemagne) et Prix d’excellence du magazine Canadian Architect (2018)