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Hausse des taux d’intérêt, inflation élevée, récession à venir… les sujets de préoccupation se multiplient pour les ménages et les entreprises.

Vous avez été nombreux à assister à la conférence web de Jimmy Jean, vice-président, économiste en chef et stratège, qui a présenté les plus récentes prévisions économiques et financières. Plusieurs internautes en ont profité pour lui poser des questions, qui n’ont pas toutes pu être répondues lors de la conférence.

Voici les réponses à 10 questions qui ont été le plus souvent posées à Jimmy Jean lors de cette présentation et le lien pour la réécoute de la web conférence.

1.     À quoi faut-il s’attendre avec les marchés boursiers d’ici la fin de 2022 et en 2023? Quelle classe d’actifs tire le mieux son épingle du jeu?

Tout porte à croire que plusieurs pays industrialisés subiront une récession au début de 2023, notamment aux États-Unis et au Canada. D’un point de vue historique, les marchés boursiers baissent de façon marquée lors des épisodes de récession. Les perspectives boursières pour les prochains trimestres sont donc moroses pour les marchés boursiers et on s’attend à ce qu’ils atteignent un creux seulement en 2023. En fait, la classe d’actifs qui pourrait le mieux tirer son épingle du jeu dans les trimestres à venir est le marché obligataire.2.     Avec l’inflation qui s’emballe et la remontée rapide des taux d’intérêt, pourrait-on se retrouver avec des taux d’intérêt très élevés fin 2022 et 2023?

Notre scénario de base stipule que les hausses de taux d’intérêt directeurs canadiens pourraient se stabiliser après une dernière augmentation de 50 points de base en octobre. Le taux cible des fonds à un jour devrait ainsi plafonner à 3,75 %. Les signes d’un ralentissement graduel de l’inflation devraient alors devenir de plus en plus apparents, ce qui devrait rassurer les responsables de la politique monétaire. Il y a toutefois un risque que l’inflation se montre plus résiliente que prévu et la Banque du Canada pourrait alors devoir accroître davantage ses taux d’intérêt pour en freiner la progression. Les risques que les taux d’intérêt soient relevés à des niveaux très élevés comme au début des années 1980 sont toutefois faibles, alors que l’inflation semble déjà avoir plafonné.

3.     Combien de temps peut durer une récession? Quels en sont les facteurs influençables?

La durée et l’ampleur des récessions diffèrent d’un cycle à l’autre. La plus courte est évidemment de deux trimestres, ce qui correspond à la durée minimale en fonction de la définition technique d’une récession. La récession la plus longue au Canada fût celle de 1981-1982 d’une durée de 6 trimestres. Chaque crise est souvent de nature unique de sorte qu’il est difficile d’établir un scénario typique. Mentionnons néanmoins comme facteurs d’influence l’ampleur et la rapidité des hausses de taux d’intérêt, une importante augmentation des prix des matières premières, une correction du marché immobilier ou encore la présence d’une austérité budgétaire.

4.     Quels sont les secteurs d’activité qui pourraient être les plus vulnérables au ralentissement économique?

Les secteurs les plus vulnérables sont ceux les plus sensibles aux hausses de taux d’intérêt. Le marché de l’habitation est évidemment en tête de liste. Plusieurs dépenses de biens durables sont aussi affectées, comme les meubles, les électro-ménagers et les automobiles. Dans la situation actuelle, les secteurs qui peinent à se remettre de la pandémie (hébergement, restauration, divertissement), ou encore ceux aux prises avec des enjeux d’endettement (hébergement et restauration, construction) ou de pénuries de main-d’œuvre (ex : transport et entreposage, fabrication), risquent d’être les plus fragilisés. En revanche, la santé, l’éducation et les secteurs primaires devraient se montrer plus résilients.

5.     Advenant que la FED continue de monter les taux au-dessus des taux canadiens, la devise canadienne peut-elle tolérer une différence de taux importante ? Qu’arrivera-t-il au taux de change USD/CAN?

L’écart entre les taux d’intérêt américains et canadiens sera un déterminant fondamental dans l’évolution du huard au cours des prochains trimestres. Comme les taux d’intérêt américains devraient augmenter davantage que ceux au Canada, le dollar canadien devrait se déprécier par rapport au dollar américain d’ici la fin de l’année. Par ailleurs, l’appétit pour le risque des investisseurs devrait rester faible au cours des prochains trimestres, ce qui joue également à l’avantage du dollar américain. Nous prévoyons toutefois un creux à 0,72 $ US au début de 2023, ce qui demeure supérieur aux creux précédents de 0,69 $ US atteints en 2020 et en 2016.

6.     Pour les renouvellements hypothécaires, un taux fixe ou variable?

Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise stratégie. L’important est de respecter sa tolérance au risque et aux fluctuations des taux d’intérêt. Dans le contexte actuel, soit avec la remontée des taux d’intérêt qui arrivera prochainement à terme, le choix d’une hypothèque à taux variable pourrait toutefois être sensée d’un point de vue mathématique. Lorsque les marchés auront plus de clarté quant à l’arrêt du resserrement monétaire, les taux obligataires de cinq ans devraient adopter une tendance baissière, ce qui pourrait faire diminuer les taux variables. Le répit risque toutefois d’être limité, alors qu’on ne s’attend pas à ce que les banques centrales ramènent les taux d’intérêt à des niveaux d’urgence comme cela s’est vu ces dernières années.

7.     Quel sera le taux d’inflation au cours de 2023?

Globalement, nous prévoyons une moyenne de 3,2 % pour l’inflation canadienne en 2023.  Nos dernières prévisions font état d’une inflation qui devrait encore s’afficher à 6,4 % en moyenne au quatrième trimestre de 2022. En 2023, nous prévoyons une diminution soutenue, dans un contexte de ralentissement économique mondial, ce qui ramènera l’inflation près de la cible de 2 % de la Banque du Canada à la fin de l’année.

8.     Quelles sont les causes de la pénurie de main-d’œuvre actuelle?

Les causes sont multiples. D’abord, des tendances démographiques affectent l’évolution de la population en âge de travailler au Québec, ailleurs au Canada, ainsi que dans plusieurs pays industrialisés. Le Québec est particulièrement affecté par cette problématique alors que la population en âge de travailler progressera de façon particulièrement faible au cours des 20 prochaines années. Ensuite, les bons rendements obtenus au sein des marchés financiers en 2020 et 2021 ont incité plusieurs travailleurs à devancer leur projet de retraite. On constate d’ailleurs une diminution du taux de participation chez les 55 ans et plus.

9.     Quels sont les changements sur le marché du travail en raison de la pénurie de main-d’œuvre?

La pandémie a aussi entraîné des changements profonds au sein du marché du travail, alors qu’une proportion plus élevée de travailleurs se disent disposés à changer d’emploi au cours de la prochaine année. Cela signale un taux de roulement du personnel plus élevé qu’à l’habitude.

10. Est-ce qu’il y aura un impact sur le Canada si la Russie décide de couper catégoriquement le gaz à l’Europe ?

Les marchés du gaz naturel demeurent des marchés régionaux. Les effets directs pour les prix au Canada devraient ainsi être de plus faible ampleur que ceux en Europe. Par ailleurs, le Canada est moins dépendant du gaz naturel pour ses besoins énergétiques que ne l’est l’Europe (particulièrement l’Allemagne). Néanmoins, la crise énergétique européenne font partie des facteurs nous amenant à prévoir une récession. Étant donné l’important poids de l’Europe dans l’économie mondiale, il y aura des effets indirects pour le Canada si la conjoncture mondiale se dégrade davantage. Cela pourrait notamment se manifester à travers une demande plus faible pour les exportations canadiennes.

source:  Desjardins.com